Alors que notre périple vers Tanger démarre, armé de la carte de notre guide touristique, j'estime la distance à parcourir. Les taxis brousse sont limités à 80 km/h mais dans la pratique ils roulent généralement au delà, comme nous avons pu le constater durant notre séjour. Sans compter qu'une bonne partie du trajet se passe sur l'autoroute. Et puis bon, même à 80, en huit heures on a largement le temps. Sauf que.

Sauf que notre chauffeur n'a pas l'air super pressé. Pas grave, il se rattrapera sur l'autoroute et puis, je le recalcule mais oui, même à 70-80, c'est jouable. On commence à se détendre et on envisage de somnoler un peu, la nuit va être longue. Sauf que.

Sauf qu'on s'approche bientôt de l'embranchement pour l'autoroute et qu'on ne la prend pas. Bon, c'est pas grave, il y en a un autre juste après à droite. Le chauffeur tourne à gauche ?! On s'engage dans la ville, descend de voiture sans un mot. Il s'approche d'un groupe de personnes et aux gestes qu'ils font, nous comprenons qu'il demande son chemin. Tout à coup, nous n'avons plus envie de dormir.
On repart, on fait demi-tour. Je m'attend à ce qu'il s'engage sur l'entrée de l'autoroute que nous avions manqué, mais non ! Malgré le panneau de quatre mètre de large marqué CASABLANCA, le chauffeur ne tourne pas. C'est maintenant évident : Il ne sait pas lire. Effarés, nous lui demandons de refaire demi tour et une autre évidence apparait, le français, il ne connait pas.
Avec force gestes et quelques mots d'arabe que Kaori connait, nous arrivons tout de même à le convaincre de s'engager sur la bonne route. On peut oublier l'idée de dormir dans le taxi, il va falloir surveiller les panneaux et le chauffeur.

J'ai l'oeil rivé sur ma montre, le compteur et je guette les panneaux kilométriques. Je recalcule continuellement notre heure estimée d'arrivée. Sur l'autoroute, notre vitesse est bien en dessous de ce qu'on avait espéré. Au fil des heures, je retarde peu à peu mon estimée. La marge de temps excédentaire dont nous disposons fond au fil des bornes kilométriques que je tâche de déchiffrer dans l'obscurité. Les "C'est bon, on sera à l'heure." que je dis à Kaori font place à "Ce serait pas mal s'il se magnait un peu", puis à "Ca va peut être être short".
Le petit matin commence à pointer son nez, nous sommes usés de stress et de fatigue. Les panneaux indiquent la fin de l'autoroute. Je calcule que nous devrions l'atteindre dans une heure soit à 6h00. Je me rappelle du trajet aller, de l'autoroute toute proche de Tanger. Nickel, ça nous laisse une heure avant l'heure à laquelle est supposé partir le bateau. Ca ne sera pas de trop pour trouver notre car et le bon bateau. Sauf que.

A suivre...